Au préscolaire, dans les dernières années, le jeu fut la méthode d’apprentissage privilégiée. Évidemment, c’est un contexte naturel qui permet aux tout-petits d’apprendre tout en s’amusant et il donne le goût d’aller à l’école. Dans le nouveau programme-cycle de l’éducation préscolaire présenté en 2021, le jeu l i b r e occupe une place très significative. En effet, selon les nouvelles modalités, le gouvernement impose désormais deux périodes de jeux libres par jour d’une durée de 45 à 60 minutes en continu, et ce, autant à l’intérieur qu’à l’extérieur. Cette durée a été pensée et établie afin de permettre aux enfants d’avoir une fenêtre de temps suffisamment large pour s’engager davantage dans le jeu.
Évidemment, le but de cet article n’est pas de faire une synthèse du programme, que vous pouvez d’ailleurs consulter sur le web, mais plutôt de le vulgariser. Il existe également une panoplie d’articles démontrant les bénéfices du jeu libre, mais je donnerai plutôt quelques exemples vécus au quotidien dans ma classe.
D’abord, le jeu libre est le moyen le plus spontané pour l’enfant de l’amener à développer des habiletés et des compétences dans les cinq domaines de développement, c’est-à-dire sur les plans physique et moteur, affectif, social, langagier et cognitif. Le rôle de l’adulte est de mettre en place du matériel varié, un contexte et un environnement sécuritaire pour laisser l’enfant explorer librement. Ainsi, il choisit avec quoi il a envie de jouer et avec qui. L’adulte ne devrait pas mettre de balises pour le jeu quant au nombre d’enfants pouvant y participer. L’adulte peut disposer du matériel pour faire des jeux de règles, des jeux symboliques, des jeux moteurs, des jeux de construction, etc.
Certes, cela peut être déstabilisant ou inconfortable pour l’adulte d’être parfois en retrait pour observer et ne pas encadrer leur jeu, mais ce sont des moments remplis d’opportunités d’apprentissage. Ce sont les actions de l’enfant jumelées aux interventions de l’adulte qui lui permettront de se développer pleinement.
Donc, l’enseignant peut questionner les enfants pour amener le jeu à un autre niveau, reformuler leurs phrases pour s’assurer qu’ils utilisent le bon modèle linguistique, prendre part à leur jeu et jouer un personnage ou être un médiateur pour aider les enfants à résoudre un conflit par exemple. Durant le jeu libre, l’enfant explore, observe, imite, expérimente, crée, bouge, manipule, se dépasse et teste ses limites et celles des autres. Le plaisir est à la base du jeu et il stimule l’enfant à s’engager. Il s’agit de faire confiance aux tout-petits et de leur laisser le temps de s’approprier leur environnement. N’oublions pas que notre cerveau d’adulte ne pense pas nécessairement comme celui d’un enfant et c’est la beauté de la chose. Les tout-petits sont très créatifs.
Récemment, j’ai ressorti les réglettes cuisenaires (oui oui, celles qui puaient dans les années 90 et qui puent toujours autant) en pensant que les enfants allaient les classer/trier selon la grandeur ou la couleur, faire des ponts, des routes, des édifices, des formes, des chiffres, des lettres, etc. À ma grande surprise, les réglettes jaunes étaient devenues des personnages de Pokémon et les élèves avaient construit une arène dans laquelle ils exerçaient les pouvoirs respectifs de leurs personnages. Ils ont élaboré leur p r o p r e scénario et ils ont trouvé une autre fonction au matériel. C’est un exemple parmi tant d’autres, qui démontre bien la richesse d’un matériel simple et accessible à tous.
Durant ce moment, les élèves ont laissé aller leur imagination, et ce, sans contrainte et sans règle. Ils ont développé leur vocabulaire en décrivant l’habillement et les caractéristiques physiques et psychologiques de leurs personnages. Ils ont exercé leur motricité fine en bâtissant l’arène avec les différents formats de réglettes, dont les petits cubes blancs. De plus, les élèves ont exprimé leurs préférences et ils ont travaillé leurs habiletés sociales au moment du choix de leur Pokémon. Puis, ils ont aussi trouvé des solutions à leurs désaccords, ils ont partagé, négocié et ils se sont entraidés.
Le plus beau dans cette situation d'apprentissage par le jeu libre? Voir la fierté dans leur regard. La fierté d’avoir créé eux-mêmes un jeu selon leurs intérêts et leurs goûts et d’en faire part à leurs camarades de classe ainsi qu’à l’adulte évidemment.
Voilà toute la richesse du jeu libre chez les enfants du préscolaire.
Voici une vidéo qui résume bien l’essentiel de mon article et qui amène à se remettre en question comme intervenant : https://www.youtube.com/watch?v=grijaLyqKjQ
Amusez-vous bien!
Sophie Bernier
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